C’est de la pâtisserie fine presque parfaite, pensée jusqu’au moindre détail, que le jeune chef algérien Nabil El Hamel propose à sa clientèle. Il y a de tout ; du goût, de la simplicité, de la couleur, de la forme et de l’innovation. Dans son atelier, tous les ingrédients, locaux en majorité, tournent au délice. Portrait.
Il est 11h30 en ce 23 octobre 2023, et l’excitation monte à Ruisseau (actuellement El Annasser), quartier algérois emblématique situé dans la commune de Belouizdad. Dans trente minutes à peine, La Toque Algérienne sera officiellement inaugurée. Nichée au cœur de la rue Aristote, cette nouvelle adresse promet de devenir un lieu emblématique célébrant la richesse culinaire algérienne.
Tout est rangé au petit soin. Imperturbable, calme, Nabil, le chef pâtissier, le maître à bord, nous reçois à son aise. Il nous invite même à découvrir ses coulisses. Entre deux choses, il répond à nos questions, il explique mais il oriente au même moment ses collaborateurs, sans s’immiscer complètement dans leur travail. Le temps presse, lui reste serein et confiant même s’il a encore du travail à faire. « Ça ne se termine jamais ! », martèle-t-il.
Il suffit de quelques minutes passées avec lui pour comprendre qu’il est perfectionniste. À la dernière minute, lorsqu’il pose les pièces de pâtisserie, ses « œuvres d’art », dans le présentoir, il se rend compte qu’il lui faut finalement une règle. « Achetez-moi une règle », demande-il. Important ? « Oui, très important pour moi, réplique-t-il, toutes les pièces doivent être posées d’une manière symétrique. Je remarque facilement le décalage ». Pour lui, la présentation a aussi besoin d’imagination et de créativité.
Il assure que « tout a une valeur ajoutée. La présentation reflète l’image du pâtissier, mais c’est aussi un signe de respect pour le client ». Une bonne organisation, une parfaite propreté et une belle présentation, tout est fondamental dans cette nouvelle maison. Rien n’est laissé au hasard. Avec le chef, on découvre le goût et la saveur, mais avant tout, des formes, des couleurs et, surtout, des noms ; ceux qui font habituellement saliver (tarte aux fruits rouges, cheesecake citron, tarte tatin, etc.) et ceux qui attisent la curiosité des papilles (Petit fantôme, La Goutte, Hamiti talons, Jupiter, Lotus, Galaxy, Lettre d’amour, etc.).
Donner une âme à chaque gâteau
Alors que l’équipe finalise les dernières retouches pour recevoir les premiers invités, le chef El Hamel n’affiche aucun signe de panique, toujours pas ! Tout est fait aux petits soins. Il n’arrête pas de faire des allers-retours entre la cuisine et le présentoir pour s’assurer que tout est bien entreposé, au millimètre prêt. Il a un concept différent des autres, un cachet, une signature. Il dit vouloir donner l’« impression que chaque gâteau a une âme ». Pas de « déjà vu » et encore moins de « déjà goûté ». « C’est pour ça que c’est une référence dans son domaine », témoigne Yacine, un jeune pâtissier venu de Batna, impressionné par son nouveau patron.
Et pour cause, le style de ce dernier est atypique, « à la fois simple mais difficile à reproduire ». Le concerné affirme que c’est sa « signature » à laquelle il n’a « pas encore donné de nom ». Il n’est pas pressé de le faire car il continue de « la perfectionner »… depuis des années. « Je travaille encore sur ma signature, mais rien n’est plus difficile que d’être simple », a-t-il constaté. Or, la simplicité s’apprend et Nabil a fait beaucoup de chemin dans cette quête.
En 2006, à peine âgé de 19 ans, il débute un stage en pâtisserie à Seddouk, sa ville natale en Kabylie. Il se souvient encore, avec reconnaissance, de ses débuts avec son premier employeur, Berkani. Depuis, il a cumulé une riche expérience puisqu’il a intégré une entreprise française comme chef pâtissier, pendant 5 ans, avant de s’installer à Constantine. « Il y a laissé son empreinte », témoigne un ami à lui, grâce au « succès de ses recettes ». Aujourd’hui, il braque ses projecteurs sur la capitale Alger, déclinant toutes les opportunités qui lui ont été offertes à l’étranger. « Pas question de se séparer d’Aksil, mon petit champion de huit mois », souligne l’heureux papa.
À la recherche de l’excellence
Pour développer son activité et atteindre l’excellence, Nabil El Hamel ne cesse de parfaire sa formation et ses compétences. D’ailleurs, en plus d’être pâtissier, il est aussi glacier et chocolatier. Le gelato, le sorbet, le smoothie, le milk-shake et le chocolat n’ont pas de secrets pour lui. Il est formé aux « entremets et petits gâteaux » par Bruno Pastorelli, Meilleur ouvrier de France, et Emmanuel Hamon, grand chef pâtissier français. Il a même suivi une formation en « sucre d’art » avec Chong Ko Wai, un chef malaisien de renommée mondiale.
En plus de satisfaire pleinement ses clients, il rêve de pouvoir représenter et de porter haut l’art culinaire algérien sucré lors de concours internationaux, à l’instar de la Coupe du monde de la pâtisserie. Il veut élargir l’horizon des gourmandises algériennes bien au-delà des gâteaux traditionnels, catégorie où l’Algérie excelle déjà. « Chacune de mes formations a contribué à la création de mon style, un mélange et un mixage de pâtisseries. Je touche à tout. Mon idée, c’est de ne pas me spécialiser dans une seule branche, mais de créer mon propre style, une touche Nabil », ambitionne-t-il.
À midi pétante, le rideau se lève devant les invités et les premiers clients, heureux de déguster quelques délices offerts par le chef pâtissier en guise de bienvenue. Il n’en fallait pas plus pour une dame, qui passait par hasard, pour être « séduite ». « Il y a du goût, mais surtout de la légèreté. Je reviendrai certainement », promet-elle. « Ce n’est vraiment pas commun », rétorque une autre cliente. Le maître des lieux ne cache pas sa satisfaction : « C’est toujours un plaisir de satisfaire mes clients. Et je suis surtout fier d’atteindre mes objectifs tracés et de réussir de nouveaux défis ». Habitué à des séances inaugurales plus fastes que celle-là, il s’isole et supervise de loin. C’est un véritable passionné qui ne reste pas sur ses acquis. « Je suis en réflexion pour créer et personnaliser des gâteaux thématiques berbères », nous confie-t-il. La Toque Algérienne, une adresse algéroise à découvrir et à recommander sans modération.
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