L’usine de l’ENIEM, basée à Oued Aïssi en Kabylie (commune de Tizi-Ouzou, à 100 km à l’est d’Alger), est à l’arrêt depuis plusieurs semaines. Cette unité de production est confrontée à d’insurmontables difficultés, qui se cumulent ces quelques dernières années. Pour ne rien arranger, elle subit actuellement une rupture de stock des matières premières nécessaires pour la fabrication des réfrigérateurs, climatiseurs, chauffe-bains, chauffages et machines à laver.
Le gouvernement algérien ne veut pas abandonner l’ENIEM
La situation de ce complexe industriel, jadis fleuron de l’économie algérienne, se dégrade de jour en jour à cause de sa gestion, largement dépassée par le temps, héritée du management des années 1970 quand l’Etat supportait la masse salariale des entreprises publiques en difficultés. Ce qui n’est plus possible ! Alors que sa productivité n’a jamais été aussi basse, avec seulement 35 000 appareils produits en 2022 sur une capacité totale de 220 000, l’ENIEM emploie plus de 1 700 ouvriers. Cette situation interne, additionnée à une perte de compétitivité effrénée et à des arrêts successifs des lignes de production, a engendré une dette colossale, un gouffre financier qui empêche cette belle marque de redécoller malgré son savoir-faire reconnu.
Ces deux dernières semaines, le gouvernement algérien s’est penché sur le cas ENIEM en tentant de la sauver. Peut-être pour la dernière fois ! « L’Etat ne lâchera pas l’entreprise », a déclaré le ministre de l’Industrie, Ali Aoun, lors d’un point de presse tenu au siège social de la société nationale, mercredi 9 août. Dans son intervention, il a insisté sur la nécessité de l’implication effective de toutes les parties concernées (travailleurs, partenaire social et direction) dans ledit projet de sauvetage. « La gestion moderne exige de fixer des objectifs et les moyens d’y parvenir », a-t-il lancé, avant de réaffirmer, dans ce sens, que des contrats de performance pour tous les cadres seront mis en place, à partir de septembre 2023.
60 millions euros de dette pour l’ENIEM
Vu sa longue expérience comme ancien leader algérien de l’électroménager et son patrimoine matériel non négligeable, l’ENIEM peut encore être un projet d’avenir économiquement viable, « mais à condition, souligne le ministre, que des efforts soient consentis par les cadres et les ouvriers ». Sur le plan de la trésorerie, M. Aoun a écarté « toute éventualité de l’effacement de la dette… car pour effacer la dette d’une entreprise, il faudrait que celle-ci produise et enregistre des bénéfices ». Or, c’est loin d’être le cas.
Les dettes de l’entreprise qui se sont accumulées dans la dernière décennie, avec une certaine accélération depuis la pandémie de la Covid-19, sont estimées aujourd’hui à près de 9 milliards de dinars, soit un peu plus de 60 millions d’euros. En l’espace de deux ans, l’ENIEM a vu défiler à sa tête 3 dirigeants, tous incapables de relancer durablement les machines avec un boulet aussi lourd.
Il reste alors la solution de la privatisation pure et simple ? C’est niet également pour celui qui est chargé par le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, de relancer et de diversifier l’industrie du pays. Il préfère plutôt « ouvrir le capital de l’ENIEM à un partenariat national ou étranger pour sauver l’entreprise et la remettre sur les bons rails car la situation actuelle menace l’avenir des travailleurs ». Cette décision reste cependant du ressort du propriétaire de l’entreprise, en l’occurrence Elec El Djazaïr. Ce holding industriel public, créé en 2015, est composé de 19 filiales, dont l’ENIEM, et 5 entreprises en participation minoritaire.
Une réunion se tiendra au siège du ministère de l’Industrie et de la Production pharmaceutique, ce lundi 14 août, entre Ali Aoun, les responsables de l’ENIEM et le syndicat UGTA. « Elle sera consacrée à l’élaboration d’un programme concret dont dépendra l’avenir de l’entreprise », annonce l’APS.