Nommé ambassadeur de France en Algérie, le 23 mars 2023, pour remplacer François Gouyette, en poste depuis 2020, et arrivé à Alger le 18 juillet, Stéphane Romatet a donc pu enfin remettre ses lettres de créance. Lors de sa déclaration à l’issue de son audience avec le président Tebboune, le désormais chef de la diplomatie française en Algérie a évoqué une relation d’une « exceptionnelle densité » entre deux pays liés par l’histoire et la géographie, mais aussi de par « les relations humaines et l’interdépendance des sociétés des deux pays ». Selon lui, il s’agit là d’« une spécificité que la France n’a pas avec d’autres pays ».
Œuvrer pour un dialogue de confiance entre la France et l’Algérie
À cet effet, et évoquant ses missions, Romatet s’est engagé à œuvrer pour « un dialogue confiant entre les deux pays sur tous les grands défis qui affectent l’environnement dans lequel évoluent les Français et les Algériens ». Il a, dans ce sens, souligné « la nécessité de créer une relation de proximité entre nos deux pays, bâtir un agenda commun, et profiter de la présence de l’Algérie au Conseil de sécurité pour intensifier notre dialogue sur les grandes questions politiques ». Celui qui occupe officiellement le très sensible poste d’ambassadeur français en Algérie se montre optimiste, affirmant avoir entamé sa mission avec « agenda positif ».
Son discours s’aligne sur celui du chef d’Etat français qui a multiplié les signaux positifs ces derniers temps, traduisant une volonté d’aller vers un réchauffement des relations entre les deux pays, par exemple en refusant de dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 malgré la pression de la droite et de l’extrême-droite, qui réclament une ligne plus dure avec Alger.
Par ailleurs, les autorités françaises ont assoupli davantage l’accès aux archives relatives à la Guerre d’Algérie en publiant, le 27 août au journal officiel, un arrêté levant les restrictions jusque-là imposées à l’accès aux archives concernant des personnes mineures impliquées dans des « affaires relatives à des faits commis en relation avec la guerre d’Algérie entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1966 ».
Faire aboutir la visite du président Tebboune en France
Ces signaux positifs contrastent avec le discours ambiant dans certains cercles politiques et médiatiques français. Ceux-là font en sorte, depuis plusieurs mois, de maintenir un climat douteux qui freine le réchauffement des relations franco-algériennes. La dernière trouvaille en date concerne des supposées « campagnes contre la langue française » en Algérie, comme c’est le cas cette semaine avec l’interdiction faite aux écoles privées de prodiguer un enseignement s’appuyant sur le « programme français ».
Sur le plan pratique, la première mission de l’ambassadeur Romatet serait probablement de contribuer à la programmation, dans les plus brefs délais, de la visite d’Etat que devrait effectuer le président Tebboune en France. Lors de sa première apparition officielle, il n’a rien laissé filtrer sur ce sujet, mais le nouveau locataire de la Résidence de France a indiqué que le président Macron l’avait chargé de transmettre un message personnel à son homologue algérien.
Reporté à deux reprises, en mai et juin, ce déplacement, qui devait répondre à celui effectué par Macron en Algérie, en août 2022, fait face à un problème de « contenu ». Le 6 août dernier, Tebboune a déclaré, lors d’une entrevue avec des représentants de médias algériens, que la visite était toujours « à l’ordre du jour » et que, de ce fait, elle n’était nullement annulée. Néanmoins, il a insisté qu’il ne faudrait pas que ça soit « une visite touristique ». En d’autres termes, il y a une mésentente entre les deux parties autour du programme officiel du voyage présidentiel. Le règlement de cette question pourrait éventuellement donner un coup de starter aux relations algéro-françaises. C’est le premier test d’envergure pour Stéphane Romatet, dont le succès ou l’échec pourrait donner un aperçu sur ce que sera son mandat en Algérie.
Biographie de Stéphane Romatet : Stéphane Romatet est un diplomate français. Né le 28 septembre 1960, il est marié et père de quatre enfants. Issu d’une formation de droit à l’Institut d’études politiques, il est également diplômé de l’ENA en 1986 (promotion « Denis Diderot »). Au cours de sa carrière, il a occupé divers postes importants au sein du ministère des Affaires étrangères et d’autres ministères français notamment la Défense. De 2011 à 2014, il connaîtra sa première expérience d’ambassadeur en occupant le poste d’Ambassadeur extraordinaire plénipotentiaire à Canberra (Australie). Il est nommé Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire au Caire (Égypte), où il a exercé ses fonctions entre 2017 et 2021. Juste avant sa nomination en tant qu’Ambassadeur de France à Alger, Haut Représentant de la République française en Algérie, Romatet était directeur du Centre de crise et de soutien au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères durant une période cruciale, allant de septembre 2021 jusqu’à mars 2023, qui a été marquée par le début de la guerre en Ukraine (février 2022) et les puissants séismes en Turquie et en Syrie (février 2023). En reconnaissance de l’ensemble de ses services distingués à son pays, il a été honoré en tant que Chevalier de la Légion d’honneur (2012) et Chevalier de l’Ordre national du Mérite (2006). En plus du français, il parle couramment l’anglais et l’allemand. Il est temps maintenant qu’il apprenne l’arabe et le berbère ! La Rédaction.