Quand l’ambassadeur de France au Niger raconte ses deux mois de calvaire  

L'ambassadeur de France au Niger, Sylvain Itté, sur TF1
Après lui avoir retiré son immunité diplomatique et considéré comme persona non grata au Niger, l’ambassadeur de France à Niamey, Sylvain Itté, s’est résigné à quitter le pays sous les pressions des militaires putschistes qui ont déposé le président élu, Mohamed Bazoum, le 26 juillet dernier. Rentré à Paris, le 27 septembre, il a dévoilé, hier, comment il a vécu deux mois de calvaire.

C’est avec un « sentiment du devoir accompli » que l’ambassadeur de France au Niger est rentré, avant-hier, en France. Son retour s’est fait sur décision du président français, Emmanuel Macron, à la suite de pressions répétées des militaires nigériens qui l’avaient obligé à rester cloitré dans sa résidence depuis le mois de juillet dernier, sans pouvoir organiser aucune activité et sans même pouvoir se nourrir normalement.

En arrivant à Paris, devant la presse, il s’est dit « fatigué » après un peu plus de huit semaines « d’extrême tension », qui visait à le « faire craquer ». Il a révélé que les « entreprises nigériennes fournissant du ravitaillement à l’ambassade étaient dissuadées, voire menacées par le nouveau pouvoir, et ont fini par ne plus venir ». Il fallait donc, a-t-il ajouté, « sortir les poubelles sans que nos amis de la junte s’en aperçoivent, faire rentrer de la nourriture, de l’eau, en faisant preuve d’ingéniosité ».

Pour l’ambassadeur de France au Niger, le putsch est une affaire nigéro-nigérienne

Sur le plan politique, l’ambassadeur de France estime que le coup d’État perpétré au Niger « est un énorme gâchis », dans lequel « il n’y a que des perdants ». Invité du JT de TF1, le diplomate a exprimé son point de vue en défendant, une nouvelle fois, le président Bazoum tout en indiquant qu’il s’agit surtout d’une affaire nigérienne interne : « Ce putsch est d’abord et avant tout, il faut bien qu’on en ait conscience, une affaire nigéro-nigérienne entre un président qui avait décidé de lutter contre la corruption et un certain nombre de généraux qui ne souhaitaient pas que cette lutte contre la corruption aille jusqu’à son terme ».

Ensuite, il est revenu sur un événement qui l’a mis physiquement en danger ainsi que ses collaborateurs, en l’occurrence la manifestation anti-française organisée devant l’ambassade de France à Niamey, le 30 juillet dernier. « L’attaque a duré plus de 2 h 30. Ce jour-là, nous étions collectivement en danger et nous sommes passés très, très près du drame, parce qu’il y avait plus de 6 000 personnes qui étaient là pour en découdre, qui étaient là pour rentrer dans l’ambassade », a-t-il relaté.

Macron n’avait plus le choix que de faire rapatrier son diplomate « pris en otage »

Sous le coup d’une décision d’expulsion émise par la junte au pouvoir, Itté aurait été immédiatement mis dans un avion vers Paris s’il était sorti du siège de l’ambassade. Or, tout en avouant que l’ambassadeur Itté a été quasiment « pris en otage » par les putschistes, le président Macron refusa catégoriquement que son représentant rentre au pays. Il a estimé que les autorités nigériennes issues du coup d’Etat étaient « illégitimes » pour expulser l’ambassadeur de France. Mais finalement, il s’est résigné à accepter le fait accompli en annonçant, dimanche dernier, le rapatriement du diplomate.

À son arrivée, ce dernier a été reçu par Catherine Colonna, la ministre française des Affaires étrangères, qui l’a remercié pour « son action et de celle des équipes qui l’entouraient au service de notre pays, dans des conditions difficiles ».

Ce revirement est accompagné d’un autre revers diplomatique puisque le président français a également annoncé le début du retour progressif des quelques 1 500 militaires français présents actuellement au Niger, opération qui devrait s’achever avant la fin de l’année en cours.

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